Food

L’industrie alimentaire belge face aux directives européennes « Corporate Sustainability Reporting Directive » et « Corporate Sustainability Due Diligence Directive »

L’année 2024 marque, pour les entreprises, le début d’un gigantesque chantier de mise en œuvre de deux directives européennes importantes, connues dans le jargon communautaire sous l’appellation « CSRD » et « CS3D ». Ces dernières imposent une série de contraintes, notamment des obligations supplémentaires de reporting, visant à une plus grande transparence sur les questions de la durabilité. Le travail de Juliette Baps a consisté à explorer la perception et les pratiques déjà mises sur rail par l’industrie alimentaire belge, choisie en raison de son poids économique et de la multiplicité de ses externalités proches et lointaines. Son analyse repose sur des entretiens semi-directifs menés auprès de la Fédération de l’industrie alimentaire belge, de l’Union wallonne des entreprises et de neuf grandes entreprises cotées en bourse ou pas. Il en résulte une perception globalement positive mais teintée de craintes, notamment quant au volume de travail et aux ressources nécessaires pour respecter ces deux nouvelles directives.

A télécharger : Mémoire Juliette Baps

Éclairage sur l’activité de multiplication de semences potagères populations biologiques, les modèles technico économiques et son développement en Wallonie

Le travail de Julian Martens porte sur le community based breeding, c’est-à-dire le système semencier de « semences populations », alternatif au système semencier industriel de type Hybrides F1. Il se concentre particulièrementsur les individus dont l’activité professionnelle, en Wallonie, consiste à multiplier les semences potagères populations pour les entreprises Cycle en Terre et Semailles. Après avoir analysé cette activité en lien avec le maraîchage et l’entreprise semencière, Julian Martens a identifié trois modèles technico-économiques de multiplicateur·rices (maraîcher·es multiplicateur·rices, multiplicateur·rices et institutions publiques) en fonction des motivations de leurs acteur·ices, du nombre d’équivalents temps plein, de la superficie et du nombre de variétés cultivées, du chiffre d’affaires, etc. Il a mis en évidence différents freins (techniques, financiers, organisationnels...) à l’essor de cette filière et proposé diverses améliorations dans le contexte d’une transition vers un système agroécologique biodiversifié durable et équitable.

A télécharger : Mémoire Julian Martens

Vsycle a vu le jour en 2020 lorsque plusieurs étudiants bioingénieurs et ingénieurs industriels se sont réunis pour participer au concours iGEM, dont l’objectif est de résoudre des problèmes sociétaux en faisant appel à la biologie synthétique. L’idée initiale était d’utiliser les protéines de nucléation de la glace (un type de protéines se liant à la glace) comme agent alternatif d’ensemencement des nuages.

Shauny Van Hoye a lancé Vsycle parce qu’il croit dans le potentiel des protéines se liant à la glace. Il s’est rapidement rendu compte qu’une alternative biologique à l’ensemencement des nuages présentait de nombreux obstacles. Il s’est donc orienté vers l’utilisation de protéines antigel (également un type de protéines se liant à la glace) pour lutter contre les dommages causés par le gel dans la culture des pommes ou des cerises, par exemple.

Cette application peut être validée de manière plus précise et est légèrement moins complexe, mais elle relève toujours de la mission de Vsycle. Vsycle entend développer ces nouvelles protéines se liant à la glace à l’aide de techniques de calcul et de biologie synthétique afin de permettre à la société de mieux faire face au changement climatique. Comment ? En fournissant plus de pluie dans les régions plus sèches grâce à l’ensemencement biologique des nuages ou encore en protégeant les fleurs des fruits des périodes de gel imprévisibles.

Vsycle est soutenue par Durf Ondernemen et coaché par Tom Van Damme.

« Développer un produit qui combine des concepts scientifiques intéressants avec des applications qui assurent un monde meilleur est devenu ma principale motivation. En tant qu’ingénieur fraîchement diplômé, j’avais peu à perdre en me lançant dans cette aventure. Le changement climatique pose de nombreux problèmes, notamment l’imprévisibilité des saisons, qui entraîne davantage de dégâts dus au gel dans les cultures fruitières. Développer une solution à ce problème en tant qu’étudiant-entrepreneur n’est pas évident, mais je bénéficie d’un vaste soutien, tant au sein de l’université, de la part de Durf Ondernemen (organisation au sein de l’UGent) et des professeurs, qu’à l’extérieur. Grâce à la bourse de la Fondation pour les Générations Futures, j’espère pouvoir produire et valider en laboratoire les protéines développées in silico. »

Vsycle remporte une bourse de prototypage de 5000 €.

Diplômé en ingénierie aérospatiale et détenteur du master HEC Entrepreneurs (ULiège), Simon Gillet est passionné par l'entrepreneuriat à impact. Son projet, Mineralio, est incubé au VentureLab et bénéficie du coaching de Frédéric Luizi.

L'histoire de Mineralio débute lors du Climathon Liège 2021. Afin de rendre l'alimentation des Belges plus durable, Simon et son équipe imaginent transformer les coquilles de moules en vaisselle de table. Cependant, à la suite de recherches plus approfondies, Simon se rend compte que les biominéraux, tels que les coquillages, peuvent être utilisés dans de nombreux secteurs.

En effet, après avoir été récoltés, nettoyés et broyés, les fragments de coquillages peuvent être utilisés en cosmétique, parapharmacie, peinture, verrerie, plasturgie, alimentation animalière, traitement des eaux, fabrication du sucre... Simon souhaite commencer par un autre secteur prometteur, la fabrication de matériaux biosourcés et éco-conçus.

Les coquillages d’élevages sont la source animale marine la plus durable. Cependant, l’incinération d’un kilogramme de coquilles émet 0,44 kilogramme de CO2 en raison de sa composition chimique.

En choisissant les coquilles de moules, un plat typiquement belge qui génère plus de 20.000 tonnes de déchets par an, Mineralio propose une solution durable pour réduire la quantité de déchets incinérés et préserver les ressources naturelles.
 

« L'alimentation durable est un sujet qui me touche beaucoup. Quand j'ai appris les externalités liées à l'incinération des coquilles, je me suis dit qu'il fallait agir, et entreprendre. En tant qu'étudiant-entrepreneur, j'ai l'occasion de découvrir le monde professionnel sous un angle unique, d'acquérir des compétences précieuses et d'être entouré de personnes très inspirantes et bienveillantes. La bourse de prototypage de la Fondation pour les Générations Futures me permettra d'obtenir un équipement plus efficace pour transformer les coquilles, ce qui me permettra de réaliser davantage de prototypes et de tester le marché. »

Mineralio remporte une bourse de prototypage de 5000€.

L’équipe derrière MilkSilk est composée de Alistaire Vionne et Georges Vicqueray, tous deux en dernière année de master bio-ingénieur à finalité chimie et bio-industries à la faculté d’agronomie de Gembloux Agro-BioTech. Cette équipe est épaulée par le VentureLab et plus particulièrement par leur coach Hubert Brogniez, expert financier.

L’objectif de MilkSilk est de récupérer les laits impropres à la consommation d’en effectuer un cracking complet et revendre les différents produits constituant le lait à des industries non-alimentaires, tout en impliquant les agriculteurs. MilkSilk veut collecter ces laits, majoritairement du lait contaminé aux antibiotiques, directement auprès des fermes et laiteries. En échange du lait, les producteurs recevront une compensation financière.

Actuellement, les antibiotiques sont encore fréquemment utilisés pour traiter les problèmes de mammites (infections au niveau des mamelles de la vache), nécessitant donc d’écarter de la consommation le lait des vaches sous traitement. La récupération de ce lait impropre à la consommation a un autre impact positif car ce lait est généralement destiné à être épandu sur le fumier ou donné au veau, entraînant une pollution des sols ou une résistance chez le jeune.

Les laits récupérés par MilkSilk subiront un cracking pour en retirer les différents composants tels que les protéines solubles et insolubles mais également la matière grasse. Ces produits seront ensuite revalorisés dans des industries non-alimentaires telles que le plastique, la colle, la peinture ou encore les enduits pour bois.

“ Le projet MilkSilk a vu le jour après de riches et nombreuses discussions autour de projets personnels futurs entre nous. Nous sommes tous deux animés par une aversion contre le gaspillage alimentaire mais également informés sur le domaine agro-alimentaire de par nos études et de l’influence gembloutoise. La valorisation d’un déchet provenant de l’agro-alimentaire est très rapidement venue sur la table. Être étudiant entrepreneur est pour nous la chance de déjà avancer dans notre projet sans tous les risques que comporte une vie active. La bourse de prototypage de la Fondation pour les Générations Futures est pour nous un premier pas vers un proof of concept”.

MilkSilk remporte une bourse de prototypage de 5000€.

Analyse prospective du degré d’autosuffisance alimentaire du département de Fatick, Sénégal

Le travail de Raïssa Montois a permis d’analyser, par une approche prospective et systémique, la capacité du département de Fatick (2646 km2), au Sénégal, à nourrir ses habitant·e·s à l’horizon 2035. Ce territoire est principalement menacé par la salinisation des sols et par des épisodes climatiques de plus en plus récurrents. Raïssa Montois a modélisé l’offre et la demande alimentaire du département selon trois scénarios prospectifs : tendanciel, agroécologique et d’intensification conventionnelle. Pour ce faire, elle a récolté des données, mené des entretiens sur place et réalisé une enquête quantitative sur le régime alimentaire local auprès d’un échantillon de ménages ruraux et urbains. Le modèle prend en compte des niveaux différents de salinisation, d’intensification agricole et de diversification des cultures. Conçu selon une approche participative, ce travail a abouti à un outil d’aide à la décision pour l’Association Nationale des Programmes de Développement Intégré et pour les collectivités locales, en partenariat avec SOS Faim.

A télécharger : Mémoire Raïssa Montois (PDF)
Intervention de Raïssa lors du webinaire, à partir de 00:03:17

Les conditions de viabilité économique des innovations dans le système alimentaire : le cas de l’ASBL FruitCollect

Pauline Botquin s’est penchée sur l’avenir à long terme de FruitCollect. Cette ASBL d’économie circulaire collecte – essentiellement aux alentours de Bruxelles – les fruits non-consommés dans les jardins de donneur·euse·s particulier·e·s pour en faire du jus et pour en faire bénéficier des publics démunis. Elle s’est particulièrement attachée à savoir si FruitCollect, qui repose largement sur le bénévolat, pouvait s’affranchir des subsides. Pour ce faire, elle a réalisé une étude logistique et de quantification de la chaîne de valeurs. Celle-ci lui a permis de constater que, pour ne plus dépendre des aides publiques, le prix de vente des jus devrait être largement supérieur au prix des jus vendus dans la grande distribution. L’autonomie financière de l’ASBL ne serait possible qu’au prix du renoncement à une part importante de son projet social : partage, apprentissage, convivialité et dons alimentaires. Plus largement, Pauline Botquin a aussi formulé des propositions de remodelage du système de subsidiation, inspirées notamment de la Politique Agricole Commune.

A télécharger Mémoire Pauline Botquin (PDF)
Intervention de Pauline lors du webinaire, à partir de 00:26:38